Publié le 30 Août 2024

ANTIPODES, une histoire dans l’Histoire, une fable bien singulière

1557, au fin fond de la jungle brésilienne dans la baie de Rio, Nicolas prisonnier des Tupinambas a su se faire accepter parmi ses ravisseurs grâce à ses talents de chanteur, et finalement ne pas être mangé contrairement au Portugais capturé quelques semaines plus tôt. Flanqué de Pépin, son épouse donnée par le chef, Nicolas découvre et adopte les coutumes de ce peuple qui l’a adopté comme celle de vivre nu.

Ces échanges, des plus fructueux, entre lui et les Tupinambas ne l’incite guère à retrouver Fort-Coligny et la mission française d’évangélisation dont il avait été arraché mais plutôt à continuer de découvrir et partager avec eux leurs modes de vie respectifs au grand dam de la mission qui considère que sa place n’est pas au milieu de ce peuple.

À partir de faits réels, l’auteur David B. tisse une trame intéressante sur les relations entre les peuples colonisateurs et les autochtones en revenant sur les préjugés de chacun sur la manière de vivre, les uns et les autres étant convaincus qu’ils détiennent la vérité. L’approche de situer l’action au sein des Tupinambas s’avère judicieuse car cela permet de voir la manière dont la tribu perçoit la tentative de colonisation.

Le lecteur prendra plaisir à découvrir les échanges, sans préjugé, entre Nicolas et les Tupinambas au travers de dialogues particulièrement savoureux ainsi que l’importance de la musique, grâce au chant interprété par Nicolas qui ponctue le récit.

La mise en images s’avère plutôt réussie, le dessinateur Éric Lambé faisant la part belle aux corps dénudés des protagonistes afin d’en mettre en valeur la gestuelle dans les tâches quotidiennes ponctuées par la danse omniprésente tout au long du récit.

ANTIPODES David B./Éric LAMBE Éditions CASTERMAN 112 pages, 22,00 € Parution le 28/08/2024

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 26 Août 2024

MISSION IN THE APOCALYPSE T1, reste-t-il seulement encore une vie ?

C’est ce que Saya Ushimitsu, jeune rescapée d’un monde détruit par le Mal cristallin qui semble avoir supprimé toute trace humaine sur sa ville, va tenter de retrouver. Flanquée de Ku, étrange créature ressemblant vaguement à un chien, Saya s’est donné pour mission de quadriller petit à petit tous les secteurs de la ville afin de chercher des créatures non infectées, mais également de traquer les personnes infectées par le mal afin de décontaminer les secteurs.

D’où vient le Mal cristallin, pourquoi a-t-elle été épargnée, trouvera-t-on un remède au fléau qui s’est abattu sur la métropole et qui sait, au-delà ? Toutes ces questions taraudent Saya qui n’aura de cesse de s’acquitter de sa mission, au péril de sa vie.

Pour une première œuvre, l’auteur Haruo Iwamune fait preuve d’une grande maturité tant dans le scénario que dans le dessin.

De zone en zone, l’angoisse de la découverte monte crescendo, l’auteur ménageant savamment le suspense pour cette jeune fille, dont on suppose qu’elle est humaine, qui traine sa solitude avec dans sa quête le secret espoir de trouver âme qui vive et qui sait, refaire du lien social dont elle semble dénuée depuis la catastrophe.

Haruo Iwamune sert un dessin hyperréaliste, très fouillé, jouant avec talent sur les contrastes dans les détours de une ville détruite à la découverte de personnages mystérieux dans un monde postapocalyptique.

Voilà donc un premier tome très prometteur qui demande à être confirmé au fur et à mesure des tomes, actuellement au nombre de trois en version originale.

MISSION IN THE APOCALYPSE T1 Haruo IWAMUNE collection Moonlight Manga Éditions DELCOURT, 224 pages 8,50 €

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 24 Août 2024

SHUBEIK LUBEIK, meilleurs vœux… Quoique !

Quelle idée a bien pu passer par la tête de ce vieux kiosquier cairote lorsqu’il achète des bouteilles contenant des vœux, dits de première catégorie, qui vont s’avérer si difficiles à écouler ? Car pour se rendre acquéreur de tels vœux susceptibles d’amener la félicité, le client doit avoir les moyens de se les procurer alors que la situation géographique du magasin dans un quartier populaire n’est guère propice à la vente. Il ne restera plus au kiosquier qu’à utiliser tous les subterfuges pour écouler au meilleur prix ces satanés vœux.

Néanmoins, petit à petit, les vœux vont susciter auprès de la population du quartier du rêve, de l’envie, voire de la convoitise et enfin, vont finir par se vendre.

Seulement, quel génie va sortir de la bouteille, pour quels résultats et au-delà le bonheur sera-t-il au rendez-vous ?

Au travers des trois personnages qui ont franchi le pas pour les acquérir, respectivement Aziza, Nour et Shokry, l’autrice Deena Mohamed dresse un portrait des plus caustiques de la société égyptienne du 21ème siècle en revenant sur les notions du désir, du bonheur et de leurs attentes pas toujours au rendez-vous.

Présentés sous forme de contes modernes, remarquablement construits à la manière des Mille et une nuits, et publiés initialement en 3 volumes correspondant à chaque personnage, les éditions STEINKIS ont fait le choix de réunir les portraits en un seul album et de le publier dans le sens de lecture arabe. Passée cette difficulté dès les premiers pages, le lecteur se prendra au jeu du récit et ne lâchera plus l’album jusqu’à sa dernière page.

Avec son dessin noir et blanc réaliste, aux profonds encrages, qui n’est pas sans rappeler celui de Craig Thomson dans Habibi, Deenad Mohamed sert parfaitement son récit, transportant le lecteur dans les méandres de la vie cairote.

Une belle réussite qui mérite de figurer parmi les meilleurs titres sortis de ce premier semestre.

SHUBEIK LUBEIK, VOS DESIRS SONT DES ORDRES Deena MOHAMED Éditions STEINKIS 516 pages, 35,00 €

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 2 Juillet 2024

PLUS VITE, PLUS HAUT, PLUS SPORT ! quand la réalité dépasse la fiction

Serions-nous en année olympique, qui plus est en France, tout à chacun ne peut l’ignorer ? Aussi, c’est assurément l’occasion rêvée de revenir sur la genèse du sport en général et pourquoi pas sur les plus folles anecdotes qui ont marqué ses disciplines.

C’est sur ce thème plutôt original que le scénariste Julien Hervieux s’est lancé un défi, et pas des moindres, celui de réaliser pas moins de dix récits tous plus incroyables les uns que les autres, au point de se demander s’ils ne sont pas sortis de son imagination. Il s’avère qu’il n’en est rien car la lecture de la page documentaire accompagnant chaque récit assure de la véracité de ses dires.

Ainsi, le lecteur découvrira la légende de Milon de Crotone, l’origine du surf ou encore les raisons qui ont poussé les organisateurs du Tour de France à introduire les voitures-balais…

Accompagné d’une dizaine de dessinateurs, tout aussi talentueux les uns que les autres, de Virginie Augustin à Julien Solé en passant par François Boucq, Luigi Critone etc., le tout mis en couleurs par Robin Le Gall, le scénariste Julien Hervieux a placé toutes ces histoires sous la bannière de la rigolade et que de mieux, que de s’instruire en s’amusant.

Avec un travail conséquent de concision car il convenait de faire un récit qui ne dépasse pas les 7 pages tout en étant dynamique, il faut reconnaître que le challenge a été relevé avec panache. Quant aux dialogues, ou plutôt les réparties, elles s’avèrent truculentes pour le plus grand plaisir du lecteur.

Saluons également le talent des auteurs qui ont su mettre en valeur les histoires plus vraies que nature.

Voilà une lecture saine et distractive que le lecteur pourra tout d’abord, compulser avec plaisir puis s’il le désire, utiliser pour étonner et instruire son auditoire lors de réunions sportives ou non.

PLUS VITE, PLUS HAUT, PLUS SPORT ! Julien HERVIEUX, Collectif de dessinateurs Éditions FLUIDE GLACIAL, 68 pages 16,90 €   

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 29 Juin 2024

ZORRO, D’ENTRE LES MORTS et s’il renaissait de ces cendres ?

On ne badine pas avec la légende du vengeur masqué d’autant plus lorsqu’on réside à La Vega, petite ville du Mexique qui aurait vu le « Z » signé sur la porte de son église il y a 180 ans. Et quelle meilleure occasion pour Antonio, son fervent admirateur, que de célébrer son héros auprès de la population en se grimant à l’occasion de la fête d’El dia de Los Muertos.

Seulement, cette animation n’est guère du goût d’El Rojo, le chef du Cartel, qui la prend pour une révolte populaire et tue Antonio sur scène devant ses enfants, lesquels n’ont d’autre solution que de se faire oublier : Diego est alors recueilli dans une hacienda par le dernier descendant de Diego de la Vega tandis que Rosa trouve refuge au village.

Vingt ans plus tard, Diego a appris à manier l’épée et à monter à cheval. Quant à Rosa, elle a gagné la confiance de l’assassin de son père et elle est devenue son chauffeur. Mais tous deux n’ont pas oublié le lourd tribu payé avec le décès de leur père et il aura suffi d’un renforcement de la tyrannie du Cartel auprès des habitants pour faire d’une pierre, deux coups en ravivant la vengeance et leur envie de débarrasser la ville de ce tyran d’El Rojo.

Il est difficile de s’emparer de cette légende pour en faire un récit contemporain qui tienne en haleine le lecteur. C’est pourtant la gageure fort réussie par l’auteur Sean Murphy qui revient sur le mythe avec une épopée chevaleresque moderne où Diego, transformé en Zorro plus vrai que nature, va affronter accompagné de sa sœur l’équipée du Cartel armée jusqu’aux dents et prête à éliminer l’empêcheur de tourner en rond. Le récit s’avère très rythmé avec bon nombre de rebondissements.

On sent, dès les premières pages, que le dessinateur Sean Murphy a pris un malin plaisir à mettre cette fiction en image avec son dessin précis, vif et sans fioriture et que l’on reconnait dès les premiers traits.

ZORRO, D’ENTRE LES MORTS Sean MURPHY collection URBAN COMICS 128 pages, 19,00 €

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 26 Juin 2024

Les indispensables de l’été 2024, de belles heures de lecture en perspective !

Membre de l’ACBD, j’ai participé à cette sélection et si je vous ai déjà mis quelques coups de cœur tels que La Route, La Cuisine des ogres ou encore Horizons Obliques que vous aurez peut-être déjà lus, je cautionne aisément cette liste qui se veut très éclectique et dont je suis assuré que les albums ne vous laisseront pas indifférents. Mais place au communiqué de presse du bureau de l’ACBD !

Communiqué de presse ACBD - le 23 juin 2024

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Les 10 indispensables de l’été 2024

« C’est l’été : lisez des BD ! »

Toute l’année, les journalistes de l’Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée (ACBD) ont la chance de lire des milliers d’albums. Ils souhaitent faciliter l’orientation des lecteurs parmi la masse des nouveautés.

Pour vous aider à choisir les BD que vous emporterez en vacances, voici par ordre alphabétique les 10 titres qui ont le plus retenu leur attention ces derniers mois :

● Au-dedans | de Will McPhail (404 Éditions)

● Carcajou | de El Diablo, Djilian Deroche et Marion Chancerel (Sarbacane)

● Le Combat d’Henry Fleming | de Steve Cuzor et Meephe Versaevel (Dupuis)

● La Cuisine des ogres | de Fabien Vehlmann et Jean-Baptiste Andreae (Rue de Sèvres)

● Horizons obliques | de Richard Blake (Urban Comics)

● It’s lonely at the centre of the earth | de Zoé Thorogood (Hi Comics)

● L’Odeur des pins | de Bianca Schaalburg (L’Agrume)

● Petit Pays | de Marzena Sowa et Sylvain Savoia (Dupuis)

● La Route | de Manu Larcenet (Dargaud)

● Sang neuf | de Jean-Christophe Chauzy (Casterman)

À partir de la liste de toutes les nouveautés bande dessinée parues entre le 1er janvier 2024 et le 31 mai 2024, les 94 membres actifs de l’ACBD ont choisi, chacun, 10 albums qui leur ont semblé incontournables.

Cette liste est le résultat de leur vote.

Bédéphilement vôtre,

Le bureau de l’ACBD

Président : Laurent Gianati (BD Gest) | Vice-présidentes : Marine Lannot (Ouest France), Loraine Adam (Rolling Stone) | Secrétaire général : Benoît Cassel (Planetebd.com) | Secrétaire adjoint : Yaneck Chareyre (Comix Strip) | Trésorier : Daniel Muraz (le Courrier Picard) | Trésorier adjoint : Frédéric Michel (avoir-alire.com)

Bernard LAUNOIS

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Publié le 25 Juin 2024

VERTS, une belle ode à la résilience

Alors que nous rentrons dans une ère de mutation écologique, voilà que la végétation reprend ses droits en envahissant tout ce qu’elle peut, que ce soit les humains ou bien l’environnement dans lequel ils vivent au point de ne plus devenir l’épiphénomène constaté quelques mois plus tôt.

Ainsi, de manière inexpliquée des enfants naissent avec des excroissances de feuillages, des seniors retrouvent de nouvelles vigueurs... Quant aux villes, elles croulent sous les arbres et les herbes qui envahissent la moindre parcelle de terre. Et comme chaque fois qu’une population est atteinte d’un mal inconnu, des phénomènes de rejet se développent, ostracisant par peur, méconnaissance, voire dégoût.

Heureusement à quelque chose malheur est bon, ne serait-ce que le regroupement de personnes atteintes par le phénomène qui ensemble, vont dépasser leurs angoisses mais aussi s’ouvrir aux autres, ce de quoi la vie moderne plutôt individualiste les avait écartés.

L’auteur Patrick Lacan signe là un beau récit fantastique sur le thème d’un retour à la nature forcé pour des raisons de bouleversements écologiques, et accompagné pour certains d’un profond changement de regard sur l’autre, mais aussi d’acceptation de ces transformations sans résignation.

De l’angoisse et l’incompréhension à l’acceptation de cette reprise en main de la nature et de toutes les conséquences que cela engendre l’auteur fait finalement un conte apaisant, rafraichissant, voire optimiste.

Dans un récit scindé en quatre parties, de l’automne au printemps en noir et blanc, à l’été en couleur, le lecteur va découvrir le superbe dessin hyperréaliste de Marion Besançon, tout en finesse et empreint d’une grande maturité graphique pour un premier roman graphique.

Fort de ses 260 pages, Verts se lit d’une traite et gageons qu’il ne laissera pas indifférent celui qui aura décidé de le découvrir.

VERTS Patrick LACAN/Marion BESANCON Éditions RUE DE SEVRES 260 pages, 28,00 €

Bernard LAUNOIS

 

 

 

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Publié le 21 Juin 2024

CIEL D’ORAGES T1, quand l’as des airs se conjugue au féminin

Fin du printemps 1940, Londres n’en peut plus de se faire canarder toutes les nuits par des raids aériens de l’aviation allemande. Aussi, pour Churchill, la seule solution pour contrer ces Teutons, c’est d’envoyer dans les airs la Royal Air Force afin de les empêcher d’atteindre la ville.

C’est ainsi que, dès la tombée de la nuit et par temps de Blitz, les as du volant rentrent en scène pour contrer l’invasion journalière. Mais un as est-il forcément d’origine masculine ? Il semble que Kate Kavendish, pilote émérite de l’Air Transport Auxiliary et personnage principal de cette série, possède de la bravoure à revendre.

Avec ce premier tome d’un triptyque qui promet, les duettistes Eric Warnauts et Guy Raives reviennent sur cette période si compliquée de la Deuxième Guerre mondiale et plus particulièrement celle vécue en Angleterre. Nous retrouvons avec plaisir la particularité des albums de ce duo de talent, celle de raconter l’histoire dans l’Histoire car au travers de leurs récits, c’est avant tout l’humain sur lequel se penchent les auteurs. Si cette pilote évolue dans un monde bien macho, le lecteur va rapidement s’apercevoir qu’elle y a toute sa place, tant professionnelle qu’amoureuse et si l’on a encore tendance aujourd’hui à dater la libération de la femme à partir de mai 1968, Eric Warnauts et Guy Raives sont enclins à tordre le coup à cette idée en la situant plutôt à cette période du récit. Les dialogues s’avèrent particulièrement alertes et le rythme du récit plutôt soutenu, à la manière d’un commando de la Royal Air Force.

Quant aux dessins, réalisés à quatre mains comme le scénario, ils restituent l’atmosphère angoissante du quotidien de ces jeunes pilotes et de leur entourage alors que la guerre fait rage. Le lecteur appréciera, comme à l’accoutumée, les superbes aquarelles de Guy Raives qui mettent en relief les dessins hyperréalistes dont ils ont tous les deux le secret.

CIEL D’ORAGES T1 London burning Éric WARNAUTS/Guy RAIVES Éditions LE LOMBARD 64 pages, 15,95 €

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 20 Juin 2024

Jesse OWENS Des miles et des miles

Le récit passionnant d’un être habité par la peur qui aura marqué l’histoire de l’athlétisme

Pas peur de son ombre, quoique, Jesse Owens petit-fils d’esclave né dans une famille alabamienne de 11 enfants s’avère être particulièrement craintif. Et voilà qu’à chaque fois qu’il se sent en danger, il ne trouve pas d’autre solution que de prendre la poudre d’escampette. Heureusement pour le rassurer et le conseiller dans ces moments difficiles, il possède un ange gardien qui se matérialise par un chat noir du nom de Essej Snewo, une sorte de Jiminy Cricket qui va tordre le cou à la superstition légendaire que la vue d’un chat noir porte malheur.

Poursuivi par la ségrégation et le racisme il décide de fuir l’Alabama pour Cleveland accompagné de Essej, croyant trouver mieux, en vain. Il doit sa planche de salut à un policier qui le poursuivant, réalise qu’il ne peut le suivre alors que lui-même est un ancien athlète de haut niveau. La suite, le lecteur aura tout loisir de découvrir dans la deuxième partie de l’album ses exploits aux Jeux Olympiques de 36 à Berlin ainsi que les conditions de son retour. 

Dans son scénario Gradimir Smudja prend le parti pris astucieux de donner le rôle principal au chat noir Essej Snewo, l’alter ego de Jesse Owens, qui va servir de conteur tout au long du récit. Le rythme de l’album se révèle à l’image du célèbre coureur Jesse Owens qui pulvérisera les records en s’adjugeant pas moins de quatre médailles d’or sans parler d’innombrables records du monde.

Lire un album dessiné par Gradimir Smudja, c’est découvrir une histoire bien sûr mais au-delà d’un découpage soigné, c’est s’émerveiller devant tout le talent d’un peintre et ce, à chaque page, chaque case qui pourraient être encadrées tant elles ressemblent à un tableau de maître. Encore un de ces livres qu’il faut lire à minimum deux fois, une pour apprécier le récit et l’autre pour s’arrêter devant chaque case afin d’en apprécier la qualité.

JESSE OWENS Des miles et des miles Gradimir SMUDJA Editions FUTUROPOLIS 128 pages, 24,00 €

Bernard LAUNOIS

 

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Publié le 17 Juin 2024

UN SOMBRE MANTEAU, une chronique sociale bien touchante

Si l’auteur Jaime Martin nous a habitué à croquer des récits d’ordre familiaux, il se plonge cette fois dans un univers où règne la solitude. Le récit se situe au fin fond des Pyrénées espagnoles et au milieu du XIXème siècle où les mentalités paysannes n’acceptent pas que des personnes vivent en marge de la société.

Le récit débute alors que la vieille guérisseuse Mara, reclue au fond des bois et dont une des principales activités, mais aussi de moyens de subsistance, consiste à exercer le métier de trémentinaise, c’est à dire à ramasser des plantes médicinales afin notamment de confectionner des onguents ce dont raffolent les villageois.

Alors qu’elle s’apprête à retourner dans sa chaumière, voilà qu’elle découvre enrubannée dans un sombre manteau une jeune femme inerte qu’elle s’empresse de ramener chez elle pour la soigner.

Si Mara apprend au village qu’une jeune femme est recherchée par les autorités, elle ne lui dit pas d’autant plus que la jeune fuyarde s’avère muette. Que faire alors, sinon de ne pas la livrer à la maréchaussée mais néanmoins de la présenter au village comme sa nièce afin de pas éveiller les soupçons ? Mais cela suffira-t-il à protéger cette jeune femme qui, par sa beauté magnifiée par le beau manteau, ne va pas tarder à créer des questionnements et susciter des jalousies ?

Martin dresse un portrait des plus touchants de ces deux êtres qui commencent à s’apprivoiser et qui apparaissent, au fur et à mesure du récit, comme deux écorchées vives, rejetées par la société à des degrés divers et de façon certes différente.

Cette chronique sociale dresse un juste portrait d’une dure vie paysanne où le poids patriarcal pèse particulièrement sur une population féminine qui n’a aucun droit, sinon celui de se taire et d’être au service de l’homme.

Avec un dessin ligne claire de bon aloi embelli par des aplats plutôt sombres, le dessinateur Jaime Martin met remarquablement en scène son récit pour le plus grand plaisir du lecteur.

UN SOMBRE MANTEAU Jaime MARTIN collection Aire Libre Éditions DUPUIS 104 pages, 21,95 €

Bernard LAUNOIS

 

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